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la Ligne d’ombre, numéro 1, janvier 2006

 

Éditorial

 

 
   

La Société des amis de Gérald Hervé, issue de la modification de l’association Mémoire et Justice fondée en octobre 1999, a vu le jour en janvier 2003. Selon ses statuts, «cette association a pour but de sauvegarder et promouvoir l’héritage littéraire et philosophique de Gérald Hervé, de divulguer sa pensée, d’aider à rassembler et mieux connaître tout ce qui se rapporte à ses livres et à sa vie, de poursuivre son engagement en faveur des droits civiques.»

La ligne d’ombre est la première revue entièrement consacrée à cet héritage. Elle se substitue au simple bulletin de liaison  divulgué parmi les membres associés.

L’œuvre de Gérald Hervé est inattendue et inentendue. Un grand pas a été franchi grâce à Michel Bourdain, éditeur français installé en Belgique, et la maison Talus d’approche : la publication en six volumes des principaux inédits de Gérald Hervé. C’est l’étape suivante que La ligne d’ombre entreprend. L’œuvre existe, maintenant il faut qu’elle vive.

La reprise du titre du roman de Joseph Conrad publié en 1917 peut se justifier par ce que John Batchelor, un de ses biographes, en a dit : «La préparation de l’avenir est le sujet de The Shadow Line». Mais aussi par l’importance de cet écrivain de la mer et du voyage, parmi les autres dont l’œuvre de Gérald Hervé porte l’empreinte : Pierre Loti, Herman Melville, Claude Farrère.

Gérald Hervé était très sensible au caractère rembranesque de l’univers conradien. Mais aussi il est l’auteur des Hérésies imaginaires (1989), ce roman «lunaire», et de l’essai philosophique La Nuit des Olympica (1999). Le clair-obscur, telle est l’une des clefs de son œuvre. La ligne d’ombre avancera donc à tâtons parmi le foisonnement de l’œuvre. Car ce qui vaut pour son univers romanesque, il faut aussi en tenir compte lorsqu’on pénètre dans sa pensée qui, comme celui-ci, s’attelle à l’impensable et aux vérités intolérables. Poétique ou polémique, le style de Gérald Hervé n’est jamais une arme de feu pourfendant les ténèbres (du mal ou de l’ignorance) mais le verbe d’un être brisé, nostalgique d’une totalité, au sens de son Orphée interdit, d’avant la faute et la punition, ce que l’on peut appeler l’enfance, ou la Grèce, laquelle «se méfie d’une clarté trop aveuglante, d’un soleil trop absolu». Mais qu’on ne s’y trompe pas : le clair-obscur n’est pas lieu de l’ambiguïté ni de la dérobade.

Nous ne nous cachons pas l’ampleur de la tâche en ce qui concerne tant l’héritage lui-même qu’il s’agit d’apprécier et de faire connaître que le temps qu’il faudra avant de parvenir à quelque résultat. La ligne d’ombre commencera d’être payée de ses efforts le jour où elle accueillera de nouveaux noms, où se joindront à elle d’autres itinérants des lettres et de la pensée, où l’emporteront la diversité des points de vue, la nouveauté des approches et des analyses.